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mercredi 23 juillet 2008

Phalarope, l’oiseau qui se nourrit au goutte-à-goutte

(Crédit photo : Rainey Schuler)

Une équipe de l’ESPCI et du MIT a expliqué comment certains oiseaux de bord de mer utilisent leur bec pour remonter contre la pesanteur les gouttes d’eau dont ils tirent leur subsistance. Phalarope, un oiseau du nord ouest de l’Amérique, a la particularité de se nourrir en attrapant avec son bec une goutte, puis une autre, et ainsi de suite, à une fréquence de deux gouttes par seconde, qu’il fait remonter jusqu’à sa bouche, en tirant parti des phénomènes de mouillage. Dans chaque goutte il y a en moyenne une proie, dont il se nourrit. Manu Prakash et John Bush (MIT) associés à David Quéré du Laboratoire de physique et mécanique des milieux hétérogenes (UMR7636 CNRS-ST2I/ ESPCI) ont élucidé le mécanisme de transport de l’eau.
Les oiseaux attrapent donc des gouttes millimétriques au bout de leur bec dont la morphologie permet d’exercer une force capillaire sur le liquide : le bec est de plus en plus fermé quand on se rapproche de la bouche, ce qui a pour effet d’aspirer le liquide. Si l’on place une goutte d’huile dans un bec artificiel semblable à celui de phalarope, on constate bien ce mouvement spontané. L’eau, cependant, résiste à cette force d’aspiration : les défauts de mouillage à la surface du bec collent le liquide à la paroi solide, comme les gouttes sur les pare-brise. Phalarope tire d’ailleurs parti de cet effet : ce collage empêche la goutte de retomber (le bec est le plus souvent incliné vers le bas).

Pour contrer cet effet des défauts, les chercheurs ont montré comment phalarope utilise un mouvement mandibulaire : par des cycles successifs de fermeture et d’ouverture du bec, la goutte avance vers la bouche, chaque cycle participant au mouvement. Grâce à la fréquence élevée du mouvement, les vitesses d’avancée peuvent être considérables, de l’ordre du mètre par seconde. Mais le plus remarquable est probablement l’optimisation du processus : il existe une gamme d’angle d’ouverture et de fermeture du bec où la goutte progresse alternativement : quand le bec se ferme, seul l’avant progresse ; quand il s’ouvre, seul l’arrière avance. Ainsi, en deux cycles seulement, une goutte millimétrique remonte le bec de plusieurs centimètres, et sans que la pesanteur ne joue le moindre rôle.

Les chercheurs espèrent utiliser ce mode de propulsion pour guider des liquides dans des systèmes microfluidiques. Leurs explications montrent aussi l’extrême sensibilité de ces animaux aux pollutions : alors l’eau peut devenir mouillante pour le bec (comme l’huile l’était), et la pesanteur retrouve ses droits, empêchant le liquide d’être hissé jusqu’à la bouche.


Source:CNRS

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