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De plus en plus d'indices géologiques indiquent que la mousson est-asiatique a débuté, il y a environ 23 millions d'années (Ma). Toutefois son évolution (surtout pour les périodes les plus anciennes) reste mal connue. En analysant les fluctuations des populations de mollusques terrestres (gastéropodes) des sédiments du Plateau du Loess Chinois (près de Dongwan), des chercheurs de l'Institut de Géologie et Géophysique de l'Académie des Sciences de Chine (Pékin) et du Laboratoire de météorologie dynamique (INSU-CNRS, ENS, Paris 6, Ecole Polytechnique) ont retracé l'évolution de la mousson est-asiatique entre 7,1 et 3,5 Ma. Ils ont pu caractériser des phases de moussons estivale et hivernale prédominantes, similaire à celles décrites durant les cycles climatiques glaciaire-interglaciaire plus récents du Quaternaire chinois. Ces travaux ont été publiés récemment dans la revue Earth Planetary Science Letters.
Les importantes séquences sédimentaires de loess, ces poussières déposées par le vent, que l'on trouve en Chine, notamment dans la région de Dongwan étaient considérées jusqu'en 2002 comme datant essentiellement du Quaternaire (2.5 derniers millions d'années). Or on sait désormais que ces séquences loessiques chinoises remontent jusqu'à 22 millions d'années avec des alternances de loess (caractérisant la mousson SE asiatique hivernale dominante) et de paléosols (caractérisant la mousson SE asiatique estivale).
La mousson SE-asitique hivernale est liée à la présence d'une cellule de haute pression sur la Sibérie contrastant avec les basses pressions sur l'océan, induisant des circulations d'air dans l'ensemble N-S et donc des conditions plus froides et arides. Au contraire en été, l'océan surchauffé contraste avec le continent plus frais induisant des déplacements d'air vers le N et apportant des précipitations sur le continent.
Les gastéropodes (escargots) actuels et fossiles chinois ont des exigences écologiques connues et peuvent être regroupés en deux groupes écologiques principaux. Le premier est caractéristique de conditions arides et froides. Ces mollusques vivent préférentiellement dans le N-NW de la Chine. le second traduit des conditions humides et plus chaudes, avec des mollusques vivants préférentiellement dans le Sud de la Chine, certains sont même très méridionaux.
Cette étude a permis de définir deux groupes d'espèces, similaires à celles déjà reconnus et employés pour caractériser les phases de moussons estivale et hivernale prédominantes durant les cycles climatiques glaciaire-interglaciaire plus récents du Quaternaire chinois. Ils ont ainsi identifié deux périodes principales de mousson entre 7.1 et3.5 Ma. Tout d'abord, entre 7,1 et 5,5 Ma, la mousson d'hiver est-asiatique a dominé le système climatique, avec une périodicité de 100 Ka. Par la suite, l'intervalle compris entre 5,1 et 4 Ma a été à une phase durant laquelle la mousson est-asiatique estivale a été dominante, marquée par une périodicité de 41 Ka.
L'enregistrement malacologique indique également que le passage d'une phase à l'autre n'a pas été brutal, comme observé pour les périodes plus récentes, mais plutôt avec une transition étagée sur environ 400 Ka, et caractérisée par le passage d'une périodicité de 100 ka de plus en plus faible au profit de celle de 41 ka.
L'intervalle plus ancien durant lequel la mousson d'hiver a dominé avec une périodicité de 100 ka est contemporain d'importantes variations globales du volume de glace stocké sur les continents, en particulier par l'édification de la calotte ouest-Antarctique qui se termine vers 6 Ma. Plus proche de la séquence étudiée, cette phase de forte mousson hivernale correspond également à une période de soulèvement du plateau tibétain qui a probablement renforcé le sous-régime hivernal, ce qui s'est traduit par un accroissement de l'aridité dans cette région jusqu'ici indiqué par des enregistrements dans l'Océan Pacifique occidental à basse résolution.
La phase de mousson estivale dominante correspond à une réorganisation de la circulation océanique générale liée notamment à la fermeture des voies maritimes de Panama et d'Indonésie à partir d'environ 5 Ma, durant un intervalle présentant une périodicité dominée par l'obliquité de l'orbite terrestre entre 5,1 et 4 Ma. Ces deux facteurs externe du forçage climatique semblent avoir favorisé le transport de chaleur et d'humidité des basses vers les hautes latitudes, contribuant au renforcement de la mousson estivale est-asiatique et permettant ainsi aux mollusques qui la caractérisent de se développer sur le plateau du loess.
- Note(s)
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- Projet financé dans le cadre des échanges CNRS-CAS et la NSF Chinoise.
- Source
- Late Neogene evolution of the East Asian monsoon revealed by terrestrial mollusk record in western Chinese Loess Plateau: from winter to summer dominated sub-regime.
Fengjiang Li, Denis-Didier Rousseau, Naiqin Wu, Qingzhen Hao, & Yunpeng Pei,
Earth Planetary Science Letters, 274 (2008), 439-447.
- Contact(s)
- Denis-Didier Rousseau
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